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Jenesuispasvégétarienne, Maiiiis…
Je ne suis pas végétarienne. Il le sait, le gars à la cantine qui s’arrache les cheveux chaque midi, quand il croit enfin avoir compris ma manière complètement aléatoire et irrationnelle de me nutrir. Tel jour, il va proposer la purée ou le gratin et sans viande, mais manque de bol, le laitage ci-présent dans l’assiette ne me convient guère, et entre le choix du bout de barbaque répugnant et le renégat de patates, je préfère encore renier l’assiette et crever de faim.
La viande. La viande, c’est par exemple une vache. Il faut pour la nourrir de l’espace, du temps, du grain et du foin : beaucoup de choses. On emmène la vache se faire tuer. Beaucoup de restes disparaissent dans la nature : on ne les utilisera pas. Même le cuir – comme l’a réalisé Marianne. Oui c’est vrai.
Après, on emmène nos morceaux de vache congelés et/ou sous barquettes dans une grande surface. Les morceaux de vache non choisis dans un certain délai seront irrémédiablement perdus, jetés dans les bennes souvent fermées-clôturées. Pour l’hygiène.
Une barquette de morceau de vache a eu la chance d’être sélectionnée. Elle va se faire cuisiner d’une façon X ou Y. Mais il y a des restes, des bouts « de gras » qu’on ne touche pas et le petit dernier qui fait la gueule et recrache des morceaux mâchés. Alors on jette. Cette famille s’en fout, ils ont un peu d’argent et mangent de la viande chaque jour. Souvent, c’est sous forme de cochonaille que cette viande entre dans la maison.
C’est le « grand jour » des apéros où on sort le saucisson, le pique nique où on dégaine le jambon et la rosette. La famille mange le cochon défunt. Sans savoir qu’en tant que porc breton, celui-ci a allègrement conchié le territoire de ses déjections démoniaques enrichies en dérivé d’azote : nitrates. Ammoniaque.
La famille mange son pique-nique de cochon made in Breizh devant une plage pleine d’algues. Des algues vertes là à cause du taux de nitrates phénoménal. « C’est dégueu » râle la mère, « pourquoi y-zenlèvent pas ça ? » Parce que le conseil régional ne veut pas. Il préfère accorder le droit de posséder un cheptel de porcs de 25% plus grand, pour faire rentrer des sous pour faire nettoyer la plage (impôts powaah). Sinon y’a pas d’argent pour ça et de toutes façons c’est de la faute au produit vaisselle et aux lessives des habitants du coin, qui ne peuvent même plus boire la flotte. Obligés d’acheter des bouteilles, qu’ils sont. En plastique binsûr. Pas vraiment recyclé à partir d’autres bouteilles, qui sait ?
Allez, mon analyse est bien simple. La réalité est terriblement plus complexe, mettant en jeu trop d’intérêts dont ceux économiques passent avant tout. La réalité inclut que les gens ne savent pas remettre en question leur mode de consommation, sauf si on les serine pour acheter du riz bio. Vous pouvez être sûrs que ce riz servira à accommoder quelque poulet qui nutritionnellement parlant n’a pas vocation d’exister.
Car contrairement à ce qu’il est dit sur ce beau site de propagande qu’est « mangerbouger.fr », il n’y a pas besoin d’une à deux fois par jour de protéines. Mais d’une à deux fois par semaine. Le corps se démerde très bien avec MOINS (j’ai pas dit sans). Les protéines se trouvent aussi ailleurs que dans la viande, mais on n’a pas envie de faire passer le message car c’est une sacrée manne de pognon. Alors on se tait.
Contrairement à ce que j’ai lu (en fait c’est l’article de Madam’ Marianne qui me fait réagir pour de bon) je mange de la viande et j’adôôôre ça. Mais. Pas celle de la cantine, laquelle se sent obligée d’en proposer de deux sortes chaque jour, et dont le goût fade ne me tente guère. Par contre, le bœuf bourguignon parental, avec une bestiole en provenance de boucherie, a beau être onéreuse elle n’en est pas moins digne (petite distribution => livraisons des fournisseurs en conséquence, moins gros => moins de gaspillage).
Problème c’est pas donné. Mais si le principe d’économie de viande est appliquée, ça fait aussi des économies tout court qui permettent de financer un bon bout de barbaque sur une courte durée. A ceux qui pensent que « si tout le monde boufferait des légumes y’en aurait jââmais assez pour tous au final », enlevez le nombre de surfaces occupées par l’alimentation réservée au bétail et une partie des terres où paît/vit/chie/dort le bétail qui ne sera plus utilisé, plantez des trucs et voyez. La PAC nous a rendus riches en nourriture et ce n’est pas prêt de s’arrêter – et pourtant nous continuons à acheter des aliments qui viennent du bout du monde.
Le processus de propagande pro-bouffe saine oublie de nous parler de tout cela. Que prendre soin de son système digestif & co va de pair avec prendre soin de sa Terre : si on veut durer plus longtemps on fait aussi durer les facteurs extérieurs plus longtemps, non ? ( :
L’économie est trop ouverte désormais pour se contenter de la France, il faut raisonner non plus à l’échelle Communautaire mais maintenant Mondial, et c’est le frein n°1 au changement des habitudes de consommation.
Pour ma pomme, trouvez mon action inutile ou mon raisonnement débile (oui j’admets il doit y avoir des failles, car rien n’est simple…) … je continue mon boycott et ma santé me dit merci.
Images : Sélection de portraits insoutenablement beaux par Niiv. J'espère que tu ne m'en voudras pas d'étaler ma bave partout ^^'